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Quand la mesure 3D permet d’optimiser une pompe cardiaque

Publié le 25 mars 2021 par Patrick RENARD
La pompe de Fineheart se compose de nombreuses pièces de très petites dimensions.
Crédit photo : FineHeart

Pour répondre au problème de l’insuffisance cardiaque sévère, FineHeart développe une pompe cardiaque révolutionnaire, qui respecte la physiologie du cœur. Pour ses besoins en contrôle dimensionnel, la start-up française a choisi la MMT Zeiss Contura et sa technologie de scanning.

De haut en bas : Arnaud Mascarell, CEO et co-fondateur, Aymeric Allain, responsable de la métrologie, et Julien Cardon, programmeur FAO chez FineHeart.

L’insuffisance cardiaque est l’incapacité du cœur à assurer un débit sanguin suffisant pour couvrir les besoins du corps en oxygène. Cette maladie touche plusieurs millions de patients par an dans les pays du G7 où elle est devenue la deuxième cause de mortalité (derrière le cancer).

La majorité des patients est très bien prise en charge avec des médicaments, au début. Mais ces médicaments ne font que retarder le moment où le patient atteint le stade d’insuffisance sévère. Celui-ci se traduit par une altération importante de la qualité de vie et de nombreuses complications, souvent mortelles.

On compte aujourd'hui, toujours au niveau des pays du G7 et par an, environ 200000 patients au stade sévère. La seule solution pour eux est d’attendre une greffe cardiaque. A ce stade, le montant de la prise en charge de chaque patient dépasse 200000 € par an. Multiplié par 200000 patients, cela représente l’un des coûts les plus importants du système de santé, avec celui de la prise en charge des cancers.

Quand on sait par ailleurs qu’il n’y a, dans le monde, que 5000 greffes de cœur par an, on comprend l’étendue du problème.

Pourquoi chercher une alternative aux DAVG ?

Il existe des implants pour lutter contre l’insuffisance cardiaque sévère : les LVAD (Left Ventricular Assist Device), ou DAVG en français (Dispositifs d'Assistance Ventriculaire Gauche). On compte environ 7000 patients implantés dans le monde. Apparu il y a 30 ans, ce type de dispositif a été miniaturisé et amélioré au fil du temps mais reste conçu pour une utilisation temporaire, permettant aux patients de gagner du temps dans l’attente d’une greffe. De plus, comme on l’a vu, la proportion d’élus est très faible.

Le principal défaut du DAVG est de ne pas respecter la physiologie, en court-circuitant le cœur. La pompe aspire le sang à l’aide d’une canule placée dans le cœur, pour le renvoyer dans l’aorte par un chemin détourné et dans le sens inverse de la circulation physiologique du sang dans le cœur. Le DAVG permet de retrouver un débit normal, mais pendant seulement quelques mois. Le principe engendre en effet une multitude de complications, au point que c’est souvent le dispositif lui-même qui cause le décès du patient (30 % des cas) si la greffe n’intervient pas dans les deux ans.

Une approche plus respectueuse de la physiologie que les DAVG

Les dimensions de la pompe s’apparentent à celles d’un index.

Les fondateurs de FineHeart sont des chirurgiens électro-physiologistes pour lesquels le principe du DAVG est un non-sens à éviter. Leur approche consiste à positionner une pompe dans le ventricule où elle propulsera le sang directement de la base du cœur à la valve aortique, de façon synchrone avec la contraction cardiaque (insuffisante mais existante). Il s’agit de profiter du débit natif généré par le cœur pour nourrir une turbine qui va augmenter le débit produit à chaque contraction. C’est le principe du vélo électrique. En plus de retarder la dégénérescence, la pompe de FineHeart est plus simple à mettre en œuvre qu’un DAVG, avec une implantation mini-invasive à cœur battant.

Cela fait maintenant 10 ans que FineHeart développe son implant, avec des avancées successives qui ont permis de finaliser la conception et d’entrer en phase de pré-industrialisation. Des expérimentations ont pu être menées sur de gros animaux, pour lesquels le dispositif a fonctionné plusieurs semaines sans aucun problème, avec une très bonne tolérance, sans événement indésirable. « On devrait pouvoir effectuer les premiers tests sur l’homme en 2022 », précise Arnaud Mascarell, CEO co-fondateur de FineHeart.

Des défis techniques avec des enjeux vitaux

Les défis techniques que représente la pompe de FineHeart sont nombreux et complexes. Ils concernent l’intelligence (synchronisation, discrimination, identification de besoin d’accélération), qui est mise en œuvre avec des micro-contrôleurs, un logiciel d’IA et des capteurs, mais aussi l’alimentation, qui s’effectue au moyen d’une batterie implantable rechargée par induction. L’usinage de la turbine constitue lui aussi une véritable gageure. Il nécessite en particulier un contrôle dimensionnel à la hauteur. Comme le dispositif est positionné dans le cœur, il ne faut pas créer d’hémolyse par cisaillement des globules rouges. On doit aussi éviter de laisser des zones où ces globules pourraient stagner et provoquer des caillots, causes potentielles de thrombose et de dysfonctionnements de la pompe. « Sur les machines d’usinage, on est à 3 microns en termes de précision », souligne Julien Cardon, programmeur FAO.

« Nous devons nous assurer que les pièces sont usinées conformément aux plans, sachant que le moindre écart peut mettre la vie du patient en péril », explique Arnaud Mascarell. « Il nous faut également maîtriser l’aspect vibratoire car la turbine tourne vite, avec des pièces de très petites dimensions en coaxialité », ajoute Aymeric Allain, responsable de la métrologie. « S’il y a le moindre balourd, le dispositif se met à vibrer. On ne peut pas se le permettre avec un implant cardiaque. »

Un besoin de mesures de circularité et de planéité

La pompe de FineHeart étant cylindrique, l’essentiel des mesures portent sur des pièces de révolution, en titane et en PEEK.

Pour le contrôle dimensionnel, FineHeart a évalué plusieurs fournisseurs de solutions de métrologie. Il fallait trouver une machine capable de mesurer toutes les pièces de la pompe fabriquées en interne, avec la possibilité de relever les défauts de forme et de vérifier notamment des circularités et des planéités. La pompe étant cylindrique, l’essentiel des mesures portent sur des pièces de révolution, en titane et en PEEK.

Le choix de FineHeart s’est porté sur la Contura de Zeiss avec une tête mesurante fixe. La réputation de qualité du fabricant allemand a bien sûr compté, ainsi que la facilité d’utilisation de la machine, sachant que sa précision répond aux besoins avec une erreur de mesure de longueur de seulement 1,7 + L/350 (en µm).

« Ce qui est intéressant sur cette machine, c’est la possibilité d’effectuer des mesures par scanning, » souligne Aymeric Allain. « Contrairement au palpage point-à-point, la tête se déplace en restant en contact avec la surface de la pièce pour suivre les formes gauches. L’analyse avec le logiciel Calypso est efficace, avec des courbes 3D faciles à exploiter dans le cas de nos pièces, caractérisées par des surfaces aux formes particulières comme les pales de la turbine. »

Un contrôle après fabrication mais aussi après expérimentation
Le contrôle dimensionnel a permis à FineHeart d’améliorer son process de fabrication. « Nous avons par exemple changé l’ordre d’usinage des éléments du corps de la pompe, pour régler un problème de coaxialité que nous n’aurions pas identifié sans la mesure effectuée sur la Contura. », ajoute Aymeric Allain. La machine est utilisée pour contrôler non seulement les pièces produites en interne, mais aussi toutes celles fabriquées par les sous-traitants de l’entreprise. Cela a permis de mettre en lumière et de régler des problèmes d’usinage. Un véritable outil d’amélioration des process pour FineHeart mais aussi pour ses sous-traitants !

En plus du contrôle après fabrication, des mesures sont effectuées après expérimentation, sur les pompes explantées et démontées. Cela permet de vérifier si des parties se sont déformées à l’usage, et, si besoin, de modifier leur conception pour les renforcer.

Pour l’avenir, FineHeart envisage d’investir dans un moyen de mesure de rugosité. Dans ce domaine, Zeiss propose des solutions de mesure confocale. Tout comme les machines à mesurer, elles sont fournies par la division Métrologie industrielle, dans laquelle a été intégrée la division microscopie il y a un an.

Contura : des mesures de précision par scanning

Le choix de FineHeart s’est porté sur la Contura avec une tête mesurante fixe.

Dotée du logiciel Calypso, la machine à mesurer Contura de Zeiss est disponible au choix avec un capteur passif fixe, avec la tête de palpage RDS orientable ou avec une tête de scanning actif. Tous les types de capteurs permettent le scanning, palpage continu particulièrement utile dans l’application de FineHeart. La variante active inclut en série la technologie Zeiss Navigator, assurant une mesure fluide sans interruptions.

La Contura utilise des guidages en céramique ou CARAT pour garantir une grande rigidité, une faible dilatation thermique et une masse en mouvement minimale. Des patins à air (aérostatiques) sur les trois axes procurent une stabilité constante, même à de grandes vitesses de déplacement et en cas de forte accélération. Les effets d'inertie dus aux forces dynamiques qui s’exercent sur le portique sont corrigés avec l'assistance d'un ordinateur. La précision requise est ainsi conservée à des vitesses de mesure élevées.

Cette précision de mesure s’exprime en termes d’erreur de longueur (EO) qui peut descendre, jusqu’à 1,7 + L/350 (en µm) avec le capteur direct VAST XXT, et même jusqu’à 1,5 + L/350 avec les têtes de scanning actives VAST XT gold et XTR gold. Ces valeurs correspondent à la plage de mesure de 700x700 à 700x1000 mm.

[Source des illustrations : FineHeart]


www.zeiss.fr, fineheart.fr

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