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Simuler l’échauffement des dispositifs médicaux dans les appareils d’IRM

Publié le 11 avril 2023 par Patrick RENARD
Les ingénieurs du MED Institute réalisent des tests physiques pour évaluer la sécurité des implants dans l'environnement IRM.
Crédit photo : Comsol

Afin d'analyser l'échauffement des implants soumis aux environnements d'imagerie par résonance magnétique (IRM), la société de recherche sous contrat Med Institute, a recours à la modélisation et la simulation numérique. Et plus précisément au logiciel Comsol Multiphysics.

Plus de 80 millions d'examens d'imagerie par résonance magnétique (IRM) sont réalisés chaque année dans le monde. Les scanners existent dans de nombreuses formes et tailles différentes, et sont classés selon l'intensité de leur champ magnétique, d'environ 0,55 à 3 teslas. Pour les patients porteurs d'implants métalliques, ces champs magnétiques puissants peuvent poser plusieurs problèmes de sécurité.

Les aimants de forte puissance peuvent notamment générer des forces et des couples susceptibles de faire migrer l'implant et potentiellement blesser le patient. De plus, les bobines de gradient des appareils d'IRM, utilisées pour la localisation spatiale, peuvent provoquer un échauffement, des vibrations, une stimulation des tissus et un dysfonctionnement de l'implant. Enfin, la grande bobine de radiofréquence (RF) des appareils d'IRM peut provoquer une résonance électromagnétique de l'implant électriquement conducteur (appelée "effet d'antenne"), entraînant là aussi un échauffement pouvant brûler le patient (Réf. 1).

Le MED Institute, une société américaine de recherche sous contrat (CRO) pour l'industrie des DM, intègre une équipe MRI Safety, qui aide les fabricants à évaluer leurs produits pour en vérifier la sécurité et la conformité en environnement IRM (Réf. 2).

Méthodes d'essai normalisées pour les dispositifs médicaux

Cette équipe travaille en étroite collaboration avec la FDA et se conforme aux normes ASTM et ISO. Plus précisément, elle suit la norme ASTM F2182 pour mesurer l'échauffement induit par la RF d'un implant médical placé dans un gel phantom, et suit la norme ISO/TS 10974 pour évaluer les dispositifs médicaux implantables actifs (DMIA) sous IRM.

Préparation d'un test physique suivant la norme ASTM F2182, qui consiste à placer le dispositif dans un fantôme de gel et à le soumettre à une IRM.

Le gel phantom est un récipient rectangulaire en acrylique rempli d'un gel conducteur qui se rapproche des propriétés thermiques et électriques du tissu humain (Réf. 3). Des sondes de température à fibre optique sont fixées au dispositif avant de l'immerger dans le gel, positionné sur la table d'un scanner IRM, à l'intérieur de la bobine RF. Les sondes mesurent les changements de température subis par le dispositif pendant l'examen.

Ce type d'expérience physique est souvent utilisé mais présente certains problèmes potentiels. Par exemple, les mouvements à l'intérieur du gel peuvent entraîner une incertitude dans les mesures, et un placement imprécis des sondes peut conduire à des résultats invalides. De plus la force magnétique peut également être une source de problèmes, selon les matériaux utilisés et leur susceptibilité magnétique (Réf. 4).

Pour aider à résoudre ces problèmes, les ingénieurs du MED Institute utilisent la modélisation et la simulation numérique comme alternative aux tests physiques. David Gross, PhD, PE, responsable des évaluations et des simulations techniques explique : « La simulation nous fournit des valeurs de température en 3D n'importe où, dans un volume donné. Nous ne sommes pas limités à des mesures ponctuelles par sonde, et nous n'avons pas à nous soucier des imprécisions de l'équipement ou de l'incertitude du placement de la sonde lors de l'expérience ».

Scanner IRM ouvert.

L'équipe a déjà utilisé par le passé la simulation pour les appareils d'IRM dans lesquels le patient est placé dans un tube fermé. Elle le fait désormais aussi pour effectuer ces mêmes analyses avec des systèmes ouverts, dont l'accès plus large est particulièrement intéressant pour l'imagerie des patients pédiatriques, bariatriques, gériatriques et claustrophobes (Réf. 5).

Simulation multiphysique pour l’échauffement induit par RF

Grâce à la simulation, le MED Institute est en mesure de comparer l'élévation de température des implants induite par RF en fonction de leur taille et de leur conception au sein d'une famille de produits, afin de déterminer la configuration la plus défavorable.

Les simulations sont faites avec Comsol Multiphysics et à l'aide des modules spécialisés RF et Heat Transfer pour combiner l'électromagnétisme avec le transfert thermique transitoire. Pour l'analyse électromagnétique, le module RF résout les équations de Maxwell dans un domaine de fréquence en régime permanent, qui est ensuite couplé séquentiellement au transfert thermique transitoire. Grâce au module Heat Transfer, l'équipe est également en mesure de résoudre les équations de conduction thermique.

Modèle d'implant de genou importé dans Comsol Multiphysics à partir d'un fichier CAO.

Dans l'exemple ci-contre, le MED Institute a importé le fichier CAO d'un implant de genou dans le logiciel de Comsol. La géométrie de l'implant comprend une extension de tige, un plateau tibial, un plateau fémoral et d'autres éléments. Tous ces composants peuvent avoir différentes tailles et être assemblés de différentes manières, et les patients implantés être scannés dans différents appareils d’IRM créant différents champs électromagnétiques. Compte tenu du nombre important de possibilités que ces variables peuvent produire, il est souvent difficile de déterminer la configuration qui entraînerait le scénario le plus défavorable en matière d’échauffement induit par RF.

« C'est là que l'utilisation de la simulation intervient », explique M. Gross. « Vous concentrez vos efforts sur les principaux facteurs qui peuvent modifier la résonance d'un implant précis ». La simulation permet en effet de mieux comprendre les limites relatives aux zones susceptibles de présenter des résonances et comment le dispositif se comporte sous différents champs électromagnétiques. Cela permet d'effectuer des analyses de sensibilité. L'équipe peut ainsi tester ce qui provoque le changement de résonance en modifiant par exemple le diamètre de la tige ou d'autres composants de l'implant. Dans ce cas précis, l'équipe a effectué des centaines de simulations afin de déterminer la taille du dispositif et la fréquence les plus défavorables.

Le recours à l'analyse du scénario le plus défavorable est crucial dans le processus de vérification. Cela permet aux fabricants de tester différents facteurs pour une large gamme d'appareils - par exemple, déterminer quelle taille entraîne le plus de complications - plutôt que de réaliser des essais physiques pour chaque variante d'un produit (Réf. 6). « Réaliser de multiples expériences physiques est très coûteux et prend beaucoup de temps, surtout si on tient compte du coût horaire de l'utilisation d'un scanner d’IRM », souligne M. Gross.

Comparaison des résultats de la simulation de résonance et d'échauffement au sein d'un scanner ouvert (à gauche) et fermé (à droite).

Comme on peut le voir sur la figure ci-contre, le champ électrique dans le fantôme de gel d'un système ouvert de 1,2 Teslas (en haut à gauche) est très différent de celui d'un système fermé de 1,5 T (en haut à droite). L'implant du genou a été simulé dans les deux systèmes. Les résultats montrent une résonance différente et une augmentation maximale de la température à l'extrémité de la tige (images du bas).

L'utilisation de la simulation a permis à l'équipe de mieux comprendre comment un dispositif se comporte dans les champs électromagnétiques. Grâce à ces résultats, elle a ensuite pu déterminer où placer idéalement les sondes de température lors du test physique dans un scanner IRM réel.

Qualification des évaluations virtuelles par la FDA

Cette utilisation de la simulation pour tester l'échauffement des DM induit par les bobines RF a inspiré le développement d'un nouvel outil destiné à accélérer le cycle de développement des produits. L'équipe du MED Institute a soumis cet outil de simulation au programme MDDT (Medical Device Development Tool) de la FDA. Ce programme permet à l'agence américaine d'évaluer et de qualifier de nouveaux outils dans le but de faire progresser les études et les produits médicaux (Réf. 7).

En novembre 2021, le MED Institute a obtenu la qualification de la FDA pour son outil de simulation, baptisé "Virtual MRI Safety Evaluations of Medical Devices", qui a pour but de tester les interactions des dispositifs médicaux dans un environnement IRM. L'outil est utilisé pour modéliser une bobine RF d'un système d’IRM, un fantôme de gel ASTM F2182 et un dispositif médical placé dans le gel. La simulation est ensuite utilisée pour analyser l'électromagnétisme et la chaleur qui se produit autour du dispositif (Réf. 8).

L'étiquetage du dispositif est décrit par la norme ASTM 2503 ou, s'il s'agit d'un DMIA, par la norme ISO 10974. Une fois les tests terminés, l'étiquette est placée sur l'emballage du dispositif et à l'intérieur du mode d'emploi (IFU) afin que les radiologues puissent voir les informations pertinentes pour un patient implanté.

« Avec cet outil, nous pouvons non seulement effectuer des tests physiques élargis, mais même les remplacer par la simulation dans certains cas », indique M. Gross.

Soutien de la FDA en matière de modélisation et de simulation

Au fil des ans, le MED Institute a évalué la sécurité de nombreux dispositifs médicaux en environnement IRM à l'aide de simulations effectuées avec Comsol Multiphysics. « Nous avons pu constater des résultats positifs immédiats dans le fait que nos clients sont en mesure de faire évaluer leurs produits plus rapidement et à moindre coût », explique M. Gross. « Ils n'ont d'ailleurs pas besoin de nous envoyer le produit réel pour tester l'échauffement induit par les bobines RF ».

La FDA est favorable à l’utilisation de la modélisation numérique et disposée à évaluer et à accepter les données issues de la simulation à la place des essais physiques. « Il est important pour les fabricants de dispositifs médicaux de savoir qu'ils peuvent compter sur les encouragements et le soutien de l'Agence », déclare M. Gross. « Le MED Institute a eu le privilège de travailler aux côtés de la FDA pendant de nombreuses années, dans l'intérêt des patients, et de constater que ses membres croient en la puissance de la modélisation et de la simulation ».

[Source des illustrations : Comsol]

Références

  1. "Thermal Injuries, Questions and Answers in MRI"
  2. Gross, "Top 10 Challenges for MRI Safety Evaluation," MED Institute Inc., June 2020
  3. "Medical Device MRI Safety Testing," MED Institute Inc., April 2016
  4. "Keynote: RF-Induced Heating of Medical Devices in Open-Bore MRI," Comsol
  5. "Radiofrequency-Induced Heating in Open Bore MRI," MED Institute Inc., Aug. 2020
  6. "The Worst-case Scenario," Packaging Compliance Labs
  7. "Medical Device Development Tools (MDDT)," U.S. Food and Drug Administration
  8. "MDDT Summary of Evidence and Basis of Qualification Decision for Virtual MRI Safety Evaluations of Medical Devices," Apr. 2021

www.comsol.fr

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