Préparation des essais CEM pour les DM incluant des fonctions radio
Les dispositifs électromédicaux communicants sans fil doivent respecter à la fois les exigences du RDM en matière de CEM, et celles de la directive RED. Olivier Roy nous explique en quoi ces exigences diffèrent et ce que les fabricants concernés doivent savoir pour y faire face.
Par Olivier Roy, responsable du laboratoire Cicor d'Angers
Le règlement européen sur les dispositifs médicaux (RDM) demande d’éliminer ou réduire tout risque lié aux champs électromagnétiques (§14.2, §18.5, §18.6). De son côté, la directive sur les équipements radio (RED) exige un niveau adéquat de compatibilité électromagnétique (CEM), conformément à la directive 2014/30/UE (§3.1b). Celle-ci stipule notamment que les produits doivent posséder « un niveau d’immunité aux perturbations électromagnétiques auxquelles il faut s’attendre dans le cadre de l’utilisation prévue, qui leur permette de fonctionner sans dégradation inacceptable de ladite utilisation ».
Prenons l'exemple d'un dispositif de diagnostic. En présence de perturbations, on peut tolérer une erreur de mesure, si elle est signalée. Auquel cas le risque est géré car aucun mauvais diagnostic n'est à craindre. Mais si ce dispositif est connecté, la communication radio doit continuer de fonctionner.
L’approche de la CEM dans le cadre du RDM est en effet totalement orientée vers la sécurité de base et les performances essentielles, alors que les exigences sont fonctionnelles pour le produit radio.
Tenir compte de l'environnement
La gestion des risques, autant pour le dispositif médical que pour le produit radio, doit tenir compte de l’environnement pour définir les types et niveaux d’essais associés. Cela suppose que l’environnement soit bien défini par le fabricant.
Il faut prévoir ensuite, pour chaque type d’essai, d’être en mesure de vérifier la sécurité de base et les performances essentielles ainsi que les exigences fonctionnelles pour la radio. Il est donc important de décliner les performances essentielles en paramètres mesurables pendant les essais, et de définir des critères d’acceptation des performances.
Pour un DM de diagnostic dont la performance essentielle dépend de la précision d’une mesure de la température interne, le fabricant doit prévoir un moyen de contrôler la qualité cette mesure lors des essais et de définir une plage d’acceptation. Les normes incitent d’ailleurs à développer du logiciel ou même du matériel spécifique pour être en mesure de bien vérifier les performances (§4.3.1 de l’EN 60601-1-2). Ceci doit être documenté dans le fichier de gestion des risques. De même, pour la communication radio, il convient d’utiliser les normes CEM de la série EN 301489-x avec leurs exigences sur les signaux d’essais et sur les performances.
Le laboratoire Cicor d'Angers accompagne les fabricants depuis l’analyse précoce des risques jusqu’aux pré-tests et à la qualification formelle, afin d’accélérer et de sécuriser la mise sur le marché.
Identifier les risques de défaillance avec les produits sur étagère
Certains DM sont constitués de sous-ensembles achetés (COTS pour Commercial Off-the-Shelf), qu'il convient d'évaluer. Cela commence par la vérification du marquage CE des sous-ensembles et de leur conformité au RDM. Si l’environnement d’utilisation prévu est compatible avec celui du produit final, le risque est limité à condition de respecter sa notice d’utilisation. Si ce n'est pas le cas, ou en l'absence de qualification médicale, il faut sélectionner un sous-ensemble répondant aux fonctionnalités essentielles du produit final et obtenir des garanties du fabricant sur la pérennité du hardware et du software (avec un contrat d’obligation d’information en cas de modification). Il est également probable que le logiciel doive suivre une norme de développement médical.
Une campagne de dérisquage est alors à prévoir pour les essais non couverts, en s’appuyant sur les rapports d’essais CEM du fabricant et une analyse des risques. Si les résultats des essais sont conformes, les risques sont faibles ou modérés selon la documentation technique.
En cas de non-conformité, le sous-ensemble est à éviter, sauf à demander des améliorations au fabricant, ou à ajouter des dispositifs de filtrage ou de blindage (sans modifier le produit).
Enfin, une nouvelle campagne d’essai à un niveau plus avancé d’intégration peut être nécessaire pour valider les fonctions critiques du produit final.
Préparation d'une campagne de réduction des risques CEM
Il faut y penser dès le début de l’étude en travaillant l’analyse des risques et en particulier lancer les développements logiciels qui seront nécessaires aux vérifications de bon fonctionnement. Si le produit est prévu uniquement pour des essais cliniques, l’analyse de risques peut permettre de limiter le périmètre des essais.
Des essais sont à faire au stade de prototype dès qu’il y a des risques identifiés et même au stade de l’étude de faisabilité pour certaines fonctions potentiellement très critiques et à risque.
Les fonctions de mesure analogique avec de petits niveaux nécessiteront des essais d’immunité aux champs rayonnés (EN 61000-4-3) et aux courants RF injectés (EN 61000-4-6), voire des essais d’immunité aux champs magnétiques (EN 61000-4-8 et EN 61000-4-39) pour les éléments sensibles aux champs magnétiques.
Les alimentations à découpage doivent faire l’objet de mesures d’émissions conduites. Le cas d’un seul bloc d’alimentation externe réputé conforme ne nécessite pas d’essais avant la qualification.
Dès qu’il y a de l'électronique numérique rapide (écran, câbles HDMI, USB ou LVDS...), il faut envisager des mesures d’émissions rayonnées.
Concernant les décharges électrostatiques, qui se font à un niveau élevé (15 kV) dans le domaine médical, il faut attendre d’avoir une enveloppe représentative, ce qui peut être le cas bien avant de lancer la fabrication de moules pour de l’injection plastique.
La grande majorité des modules radio disponibles sur étagère ne présentent pas de risque CEM ou Radio s’ils disposent d’une attestation UE de type. Cette attestation garantit que l’analyse de risques et les rapports ont été validés par un organisme notifié RED.
Dans le cas d’une fonction radio développée spécifiquement, il est indispensable de faire des mesures de puissance, d’émissions indésirables et de blocking ainsi que des mesures d’immunité aux champs rayonnés (EN61000-4-3)
Dès que le prototype est représentatif de la future série, il faut réaliser une campagne d’essais complète afin de faire les dernières mises au point avant de passer à la qualification sur la version finale.
Optimiser les tests CEM pour couvrir les deux qualifications
Les niveaux d’essais sont souvent différents, mais pour les phénomènes permanents (immunité RF conduite ou rayonnée), un essai à un niveau plus élevé est qualifiant.
Pour les phénomènes transitoires (décharges électrostatiques, transitoires rapides en salves, onde de choc et microcoupures), il sera nécessaire de traiter tous les niveaux requis par les différents standards applicables au produit.
Il est donc possible d'avoir des essais communs, et surtout d'utiliser une seule installation d’essais où les différentes fonctions sont vérifiées en même temps.





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