Implants orthopédiques : le Snitem et l’AFIDEO vent debout contre l’annonce du CEPS
Après le Snitem, c'est au tour de l’AFIDEO de réagir vivement à l'annonce par le CEPS d'imposer une nouvelle baisse brutale et massive des prix des implants orthopédiques, qui font l'objet d'une tarification régulée depuis la fin des années 1990.
Le 10 juillet dernier, le Syndicat national de l’industrie des technologies médicales (Snitem) annonçait dans un communiqué s'opposer fermement à la volonté du Comité économique des produits de santé (CEPS) d'imposer une contribution du secteur de l'orthopédie en 2025 à hauteur de 32 M€ via la baisse du prix des implants. Une nouvelle baisse puisqu'elle s'ajoute à d'autres diminutions tarifaires que les entreprises du secteur ont déjà dû absorber ces dernières années : -17 % pour les implants de hanche, -11 % pour le genou jusqu’à -29 % pour la chirurgie maxillo-faciale, d'après le syndicat, qui accuse les autorités de sacrifier la souveraineté orthopédique de la France et ses patients.
La colère est tout aussi grande du côté de l'Association des Fabricants, Importateurs, Distributeurs Européens d’implants Orthopédiques et traumatologiques (AFIDEO), qui a réagi le 16 juillet. Le syndicat rappelle qu'en parallèle de ces révisions à la baisse, les industriels ont dû faire face à de multiples difficultés ainsi qu’à des hausses régulières de coûts, et cela sans jamais que l’assurance maladie ne soit mise à contribution. Il mentionne notamment les récentes tensions mondiales, notamment depuis la crise en Ukraine, qui ont induit une flambée du prix des matières premières parmi lesquelles le titane, le chrome-cobalt et le polyéthylène. Des matières composant des implants orthopédiques, et qui ne sont pas produites en France.
L’ensemble de ces difficultés accumulées provoquent des défaillances d’entreprises, des rachats de sociétés françaises et européennes par des groupes financiers extra-européens, des arrêts de gammes et donc des pénuries d’implants et de fournisseurs. Ces douze derniers mois, les deux plus gros fabricants français d’implants ont été cédés à des entreprises indienne et américaine, précise l'AFIDEO, qui déclare que l'autonomie sanitaire en orthopédie est en péril.
Des propositions restées lettre morte
Conscients des enjeux médicaux et économiques, les fabricants d’implants ont émis des propositions afin de permettre à la CNAM de générer des économies. Depuis 2022, ils alertent sur certaines dépenses non justifiées et proposent concrètement d’agir avec des projets chiffrés et argumentés, et qui permettent de générer des économies substantielles.
De son côté, le groupe orthopédie du Snitem a formulé une contre-proposition responsable, en concertation avec les professionnels de terrain, intégrant à la fois les contraintes budgétaires et la nécessité de préserver le tissu industriel en orthopédie, ainsi que la qualité de l’offre de soins. Cette contre-proposition devrait permettre de générer 27 M€ d’économies sur 3 ans. Un travail approfondi a également été fait afin de proposer de nouveaux leviers d’économies via le bon usage des produits et l’optimisation des parcours de soins.
Pourtant, rien n’y fait, déplore l'AFIDEO, le CEPS décidant unilatéralement, sans tenir compte des propositions et contre-propositions. Il précise que les difficultés déjà observées en France, de baisser violemment les tarifs de remboursement des implants, sont en contradiction totale avec les engagements du Président de la République et du Gouvernement sur l’enjeu de l’autonomie sanitaire.
L'AFIDEO signale que cette nouvelle contribution de 32 M€ pourrait induire près du double en manque à gagner pour l’État sur les plans fiscaux et sociaux, et sans mettre un terme aux fuites de deniers publics que signale l’association depuis près de 3 ans (à hauteur désormais de 20 M€). Le CEPS contribuerait ainsi sciemment à l’augmentation de la dette publique et à la disparition du tissu industriel français et européen, berceau de l’innovation mondiale en orthopédie, qui garantissait l’autonomie sanitaire.
L'AFIDEO prévoit que les arrêts de gammes, les défaillances d’entreprises, et les ruptures de stocks, qui pénalisent in fine les patients, vont se poursuivre et s’accélérer, drainant dans son sillage la médecine à deux vitesses. D’après une enquête interne menée par le Snitem auprès des adhérents du secteur, à la suite des annonces du CEPS, 43 % envisagent des fermetures de sites ou d’activité, 71 % l’arrêt de projets R&D et 79 % des arrêts de gammes.
Un appel à la concertation inaudible ?
Il est urgent de revoir le modèle de régulation des dépenses de santé publique en orthopédie afin de garantir aux patients français et européens un accès équitable et durable à des soins de qualité. L’orthopédie française étant par ailleurs structurante pour le tissu industriel de la métallurgie, la menace s’étend à la transformation plastique, l’instrumentation chirurgicale, ainsi qu’aux laboratoires d’analyses techniques, aux filières de nettoyage et de la stérilisation…
L’AFIDEO appelle à une large concertation publique des parties prenantes (chirurgiens, patients, ministères, industriels, établissements de santé…) pour partager les constats, établir un diagnostic, des objectifs, identifier des leviers d’économies pour tous et dégager des pistes d’amélioration du parcours de soins pour le patient.