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Côté recherche

Un film biologique pour prévenir les infections et les inflammations liées aux implants

Publié le 01 décembre 2015 par Patrick RENARD
Crédit photo : Inserm (Patrick Delapierre)

Des chercheurs de l'Inserm sont parvenus à créer un film biologique à la fois antibactérien, antifongique et anti-inflammatoire. Il pourrait recouvrir les implants et d'autres DM comme les cathéters pour prévenir ou contrôler les infections post-opératoires.

Les dispositifs médicaux implantables constituent une interface idéale pour les micro-organismes qui peuvent facilement coloniser leur surface, entrainer une réaction inflammatoire et aboutir au rejet de l’implant. Ces infections sont principalement dues aux bactéries, telles que le fameux staphylocoque doré, et au bacille pyocyanique, voire parfois à des champignons ou des levures.

L’enjeu lié à l’implantation des DM dans l’organisme est de prévenir l’apparition de ces infections sans recourir aux antibiotiques, dont l'action est maintenant limitée par l’émergence de bactéries multi-résistantes.

Un film de 400 à 600 nm d'épaisseur

Dans ce contexte, les chercheurs de l’Unité 1121 « Biomatériaux et Bioingénierie » (Inserm/Université de Strasbourg) en collaboration avec quatre laboratoires (la société Protip Medical, l’Université d’Heidelberg, l’Institut de physique et chimie des matériaux de Strasbourg et l’Institut Charles Sadron) ont mis au point un film biologique aux propriétés à la fois antimicrobiennes, antifongiques et anti-inflammatoires. Pour sa mise au point, les scientifiques ont utilisé la combinaison de deux substances - la poly(arginine) (PAR) et l’acide hyaluronique (HA) - pour réaliser un film invisible à l’œil nu (entre 400 et 600 nm d’épaisseur) constitué de plusieurs couches de polymère.

L’arginine est métabolisée par les cellules immunitaires. C'est pourquoi elle a été utilisée pour communiquer avec le système immunitaire et obtenir l’effet anti-inflammatoire souhaité.

L’acide hyaluronique, un composant naturel de l’organisme, a été choisi pour sa biocompatibilité et son effet inhibiteur de la croissance bactérienne.

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Des peptides antimicrobiens embarqués

L’originalité du film vient également du fait qu’il embarque des peptides antimicrobiens naturels, en particulier la catéstatine, pour empêcher d’éventuelles infections autour de l’implant. Ceux-ci constituent une alternative aux antibiotiques actuellement utilisés. En plus d’avoir une activité antimicrobienne importante, ces peptides sont peu toxiques pour l’organisme qui en sécrète également. Ils sont capables de tuer les bactéries en créant des trous dans leur paroi cellulaire tout en empêchant une contre-attaque de leur part.

Le tout sur une fine couche d’argent

Dans cette étude, les chercheurs strasbourgeois montrent que la poly(arginine) associée à l’acide hyaluronique a une activité antimicrobienne contre le staphylocoque doré pendant plus de 24 heures. « Pour prolonger cette activité, nous avons déposé un précurseur à base d’argent sur un implant en titane, avant l’apposition du film. L’argent est une substance anti infectieuse actuellement utilisée sur les cathéters et les pansements. Cette stratégie nous a permis d’obtenir une activité antimicrobienne à long terme » explique Philippe Lavalle, directeur de recherche de l'Unité 1121 de l'Inserm.

Les enzymes du corps humain vont dégrader progressivement les couches de polymères et libérer ainsi les molécules actives qui y sont emprisonnées. Cette activation débute dès l'implantation ; ce qui est essentiel car ce sont les premières heures qui sont critiques en matière de lutte contre les processus d'inflammation et d'infection.

Des résultats prometteurs pour les infections fréquentes

Les résultats des nombreux tests réalisés sur ce nouveau film révèlent qu’il limite l’inflammation et prévient les infections bactériennes et fongiques les plus courantes.

Au contact du sang humain, la présence du film sur l’implant supprime en effet l’activation des marqueurs de l’inflammation produits en temps normal par les cellules du système immunitaire en réaction à l’implantation. Et en présence de bactéries (Staphylococcus aureus), d’une souche de levure (Candida albicans) ou de champignon (Aspegillus fumigatus), à l’origine d’infections fréquentes associées à l’implant, le film inhibe leur croissance et leur prolifération à long terme.

Ces travaux ont reçu le soutien financier de l’Institut Carnot MICA et de la Commission européenne dans le cadre du projet européen « Immodgel ». Un brevet devrait être déposé à la fin du mois d'avril aux États-Unis dans un premier temps et en Europe ensuite.

La prochaine étape va consister à tester ce revêtement sur un modèle animal, avec des valves cardiaques implantés sur des rats. Une autre piste de recherche concerne la réalisation d'un revêtement intelligent, libérant l'agent anti-microbien uniquement en présence de bactéries, afin de prolonger son effet dans le temps.


Inserm, F-75654 Paris, www.inserm.fr

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