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Sous-traitance et fabrication additive au coeur d’Implants 2016

Publié le 03 octobre 2016 par Patrick RENARD
Crédit photo : Vert Com

Comme à l’accoutumée, la 12ème édition du congrès Implants a réuni des orateurs de qualité, représentant des acteurs clé du marché de l’orthopédie. Ils sont venus partager leur vision de l'avenir du secteur, en matière de sous-traitance et de fabrication additive.

Rendez-vous incontournable des acteurs du marché de l’orthopédie, le congrès Implants a renouvelé, le 7 juin 2016, la formule inaugurée l’an dernier. A savoir une journée à Paris (et non plus à Lyon comme les années précédentes) composée de conférences de qualité, agrémentée d’une mini-exposition dédiée aux industriels souhaitant présenter leurs réalisations les plus récentes.  Cet espace, tout comme les pauses et le déjeuner, permettent de favoriser le réseautage, qui fait partie de l’intérêt du congrès.

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Ali madani, CEO d'Avicenne.

Comme à l'accoutumée, Ali Madani, CEO d’Avicenne, a entamé la journée avec deux "tutoriaux" dévoilant les principaux résultats des dernières études réalisées par le cabinet de conseil sur le marché de l’orthopédie et sur la sous-traitance.

Une croissance à deux vitesses

Premier constat, le marché mondial de l’orthopédie (hanche, genou, rachis, trauma, extrémités, orthobiologie) a enregistré une croissance de 4,3 % de 2014 à 2015 pour atteindre 39 Md$. Il devrait suivre la même tendance dans les années à venir pour atteindre 48 Md$ en 2020. Une prévision légèrement inférieure à celle de l’étude précédente.

En Europe, c’est l’Allemagne qui représente le plus gros du marché. Viennent ensuite la Grande-Bretagne, la France et l’Italie. Entamée depuis quelques années, la tendance se confirme du recul relatif des 5 acteurs majeurs (Depuy-Synthes, Zimmer Biomet, Stryker, Medtronic, Smith & Nephew) face aux "challengers", qui grignotent 1 à 2 % de parts de marché par an. Si ces poids lourds représentent encore 62 % du marché mondial (contre 65 % en 2014) et 54 % du marché européen, des entreprises comme Wright, Lima ou encore les français LDR Medical, Mathis, Amplitude et Tornier (qui a acquis Wright en octobre 2015), affichent des croissances beaucoup plus soutenues (16,5 % en moyenne). Parmi les atouts de ces challengers face aux leaders : une plus grande personnalisation, des gammes de produits plus étendues, l’attraction de nouvelles forces de ventes et des services à la fois locaux et de haut niveau. De leur côté, les leaders se voient obligés, pour croitre, d’acquérir des rivaux (Depuy-Synthes, Zimmer-Biomet, Medtronic-Covidien). Zimmer Biomet a d'ailleurs racheté LDR Medical en juin dernier.

Globalement, le marché est tiré par la croissance de la population (surtout des séniors), de l’obésité et des dépenses de santé, ainsi que par l’innovation. En revanche, il est freiné par une baisse généralisée des remboursements, une réglementation de plus en plus contraignante, et des prix qui ne cessent de baisser, notamment au travers du développement d’achats groupés. En France, des groupements d’hôpitaux privés (Vitalia, Générale de Santé…) tentent de centraliser leurs achats d’implants. Cela permet d’obtenir des réductions, qui restent toutefois limitées à quelques pourcents.

Vers davantage de sous-traitance

L’étude des tendances dans la sous-traitance confirme la réduction, pas-à-pas mais continue, de la production "maison" au profit de la sous-traitance. En 2015, pour fabriquer leurs implants, instruments et accessoires, les fournisseurs ont dépensé 3,7 Md$ en interne et 4,4 Md$ auprès de sous-traitants. Cela représente une augmentation de 6,2 % par rapport à 2014. Le marché de la sous-traitance croît donc plus rapidement que celui, global, de l’orthopédie, avec même une prévision d’accélération d'ici 20020 (+7,4 % en moyenne annuelle).

Les challengers sont les premiers à faire appel à la sous-traitance (à hauteur de 1,68 M$). Du côté des leaders, c’est surtout le cas de Depuy-Synthes (830 M$), Zimmer Biomet (625 M$), Stryker (600 M$) et Smith & Nephew (470 M$). Quant à Medtronics, l'entreprise n’a dépensé que 180 M$ en sous-traitance du fait de sa stratégie singulière de garder en interne ses procédés de fabrication.

Les activités les plus souvent sous-traitées concernent les céramiques (98 %), les boites (96 %), la forge d’implants (à hauteur de 85 %), les instruments (72 %), le revêtement (67 %) et la fonte d’implants (46 %).

Au niveau mondial, les 15 principaux sous-traitants de l’orthopédie représentent 48 % du marché soit 34 M$ de CA, avec en tête Tecomet, Orchid, CeramTec, Paragon Medical et Greatbatch. On observe toujours une tendance à la concentration par acquisitions. En 2015, Orchid a ainsi racheté Alhenia et Cam Bioceramics China, tandis que Greatbatch a mis la main sur Lake Region. Cette concentration des sous-traitants répond à des exigences croissantes de la part de leurs clients, qui leur demandent de réduire les coûts et même parfois de les suivre dans les pays à faible coût de main d’œuvre. Mais ce "risque" de délocalisation est limité essentiellement à la fabrication d’instruments génériques et d’implants relatifs au rachis et au trauma.

L’étude sur la sous-traitance en 2015 incluait cette année un volet sur la fabrication additive, même si elle ne représente encore qu’un petit pourcentage des produits orthopédiques fabriqués. Essentiellement adaptée à la production de petites pièces, en petites séries, la fabrication additive pourrait de plus en plus concerner les cupules de reprise et certains implants rachidiens et de trauma.

Une première session consacrée à la sous-traitance

Dédiée à la sous-traitance, la première session a débuté avec Simon Adam, directeur de la qualité des fournisseurs chez Depuy Synthes, venu présenter MedAccred. Géré par PRI (Performance Review Institute), ce programme de surveillance de la chaine d’approvisionnement pour les procédés de fabrication critiques est inspiré du programme Nadcap, dédié à l’Aéronautique. Son but est de réduire le nombre d’audits fournisseurs, souvent redondants (voir cet article pour davantage de détails).

Mark Kemp, président et COO de Tecomet, et Tobias W. Buck, CEO de Paragon Medical, sont venus successivement partager leurs visions des relations entre OEM et sous-traitant, en développant les bénéfices du partenariat stratégique.

Laurent Pruvost, président de In’Tech Medical a décrit les challenges actuels de la sous-traitance, qui concernent surtout la tendance à la consolidation, la pression réglementaire sur la qualité des procédés, et l’environnement très concurrentiel qui tire les prix vers le bas.

Mario Powierski, spécialiste de la qualité des fournisseurs chez Zimmer Biomet, a expliqué comment l’entreprise s’assurait de la qualité de ses fournisseurs : au travers d’une évaluation initiale par questionnaire, puis d’une mesure continue des performances. Cette mesure passe par des KPI (Keep Performance Indicators) issus de données sélectionnées pour leur pertinence, et qui aboutissent à l’attribution d’un score pour chaque fournisseur.

Une deuxième dédiée à la fabrication additive

La session de conférences de l'après-midi était consacrée à la fabrication additive. Comme l'a rappelé Ali Madani le matin, les principaux atouts de la fabrication additive exploitées dans l’orthopédie sont l’ostéo-intégration et la réalisation de pièces métalliques complexes, de façon simultanée et pour différentes tailles, forme et conceptions. Zimmer, Lima et Adler Ortho ont investi massivement dans cette technologie. Ali Madani a consacré un article détaillé sur le sujet en page 46 du numéro de mai 2016 de DeviceMed.

Mark Morrison, principal research scientist chez Smith & Nephew, a entamé la session en expliquant la place qu’elle occupe dans son entreprise. Celle-ci produit, depuis 2009, des guides de coupe (Visionaire) adaptés à chaque patient, avec des données issues d’IRM. Une approche qui élimine jusqu’à 21 étapes chirurgicales, évite la violation du canal intramédullaire, réduit la perte de sang, minimise le nombre d’instruments, et réduit les coûts. Le système Redapt a également été évoqué. Il s'agit  d'une coque en titane imprimée en 3D avec une structure poreuse acétabulaire favorisant l’ostéo-intégration.

Mark Morrison a précisé que les challenges restaient nombreux en matière de fabrication additive : la réglementation, le coût élevé des poudres, la finition de surface, le coût des logiciels, la précision dimensionnelle, le contrôle de la qualité, le post-traitement, les propriétés mécaniques, la vitesse de production, et les limites en termes de dimensions de pièces. Mais les principaux acteurs de l’orthopédie produisent déjà des dispositifs imprimés, ou tout au moins expérimentent la fabrication additive. Les premières applications concernent des instruments ou des implants spécifiques à chaque patient, des structures poreuses  destinées à l’ostéo-intégration, et des dispositifs ne pouvant être fabriqués avec d’autres méthodes. En conclusion, Mark Morrison a précisé que l’extension à d’autres applications sera accélérée par les améliorations des propriétés et par la réduction des coûts.

La fabrication additive a aussi sa place chez Stryker. Robin Stamp , ingénieur superviseur, a rappelé que tout a débuté en 2007 avec un premier prototype, pour aboutir en 2011 avec une première production. Stryker recourt à la fabrication additive pour accélérer le processus de prototypage et en production, pour obtenir des propriétés uniques, des composants impossible à réaliser autrement, et des options adaptées à la diversité des patients.

La fabrication additive métallique fait appel à des poudres. Christian Décaillet, directeur du développement marketing et commercial chez Tirus International, identifie plusieurs défis à relever pour accélérer l’utilisation de la fabrication additive dans le secteur des implants. Il faut notamment pouvoir passer à des structures essentiellement poreuses actuellement, à des pièces "denses". Pour cela, il existe des solutions comme le procédé HIP (Hot Isostatic Pressing) pour fermer toute porosité résiduelle. Il faut aussi réduire le prix de la poudre de titane, qui se situe actuellement autour de 300 $ le kilo. Pour ce faire, il faut pouvoir augmenter la productivité et le rendement, actuellement inférieur à 30%, et utiliser des débris comme matière première, tout en garantissant un taux d’oxygène très bas. Enfin, il faut réduire le coût, encore très élevée, des procédés de fabrication additive en masse.

De côté des fournisseurs d'équipement, Germain MatteCréerrn, directeur des ventes en France chez Concept Laser, a présenté le procédé LaserCusing, de fusion au laser de poudres métalliques. Dans le domaine médical, celui-ci se distingue notamment par son degré élevé de personnalisation, sa capacité à reproduire des structures microcellulaires, et l’intégration de fonctions additionnelles. En orthopédie, le LaserCusing est utilisé par exemple pour produire des tiges de prothèse de hanche en titane avec une surface macroporeuse et des canaux intégrés pour le dépôt de médicament. Il permet également de réaliser des implants crâniens en titane avec une structure macroporeuse au niveau des zones de transition. Ces deux exemples correspondent à des projets Fraunhofer IWU. D’autres projets ont été réalisés avec le même procédé comme des prothèses de disque intervertébral à haute mobilité en titane (Tsunami Medical) et des instruments chirurgicaux en inox.

Germain Mattern a dévoilé une nouvelle architecture modulaire censée ouvrir la voie à l’usine de fabrication additive de demain. L’idée principale est de séparer les parties pré-production et production, pour favoriser un fonctionnement parallèle plutôt que séquentiel. Le but est de rendre la fabrication additive plus rapide, plus économique et plus industrielle.

Enfin, Nelso Antolotti, CEO d’Eurocoating, est venu parler de l’avenir des techniques de revêtement dans l’orthopédie face à la fabrication additive. Cette dernière inclut l’ingénierie de surface, et peut donc éliminer a priori le besoin de faire appel aux technologies de revêtement. Mais la technologie de projection thermique plasma de titane, par exemple, est devenue particulièrement efficace pour créer des surfaces poreuses sur les implants. D’après Nelso Antolotti ce type de technique de revêtement restera encore longtemps une solution de choix dans le cadre d’une production de masse.

Rendez-vous à la prochaine édition du congrès Implants, qui se déroulera le 8 juin 2017, à nouveau à Paris.


www.implants-event.com

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